En ouverture de session, Jean-Pierre Pelage (CHU Caen) nous rappelle quelques éléments essentiels dans la prise en charge des patients polytraumatisés. On distingue d’une part les patients en choc hémodynamique instable malgré réanimation requérant une chirurgie d’hémostase si possible précédée d’une FAST échographie et de radiographies (thorax et bassin), et d’autre part les patients stables pouvant bénéficier d’un scanner corps entier, qui reste le Gold-standard pour le diagnostic des lésions traumatiques. À propos du protocole d’acquisition, plusieurs protocoles sont possibles. La population des patients polytraumatisés étant composée de patients souvent jeunes, ayant des scanners et parfois des embolisations de façon répétée, une attention particulière doit être accordée à la dose d’irradiation. Ainsi, l’équipe de Caen recommande l’utilisation du scanner bi-phasique thoraco-abdomino-pelvien, que l’on peut éventuellement coupler à une hélice tardive en cas de suspicion de plaie des voies urinaires excrétrices, ou de doute sur un saignement actif.
Mathieu Rodière (CHU Grenoble) rapporte son expérience et ses recommandations quant à la gestion des traumatismes aortiques. Il nous rappelle que selon la classification de Goarin, les lacérations intimo-médiales requièrent une surveillance clinique, les ruptures sous-adventitielles nécessitent une thérapeutique rapide, tandis que les patients atteints de rupture pariétale totale, gravissime, survivent rarement jusqu’au trauma-center, et requièrent un traitement en urgence absolue. Il ne recommande pas d’acquisition synchronisée sur la fréquence cardiaque pour les lésions de l’isthme aortique, qui est une région fixée est peu soumise aux artéfacts de battement cardiaque, mais plutôt pour des lésions suspectées de la jonction sino-tubulaire et de l’aorte ascendante.
La supériorité du traitement endovasculaire par endoprothèse aortique sur la chirurgie est largement démontrée par la littérature, avec un faible taux de complications post-interventionnelles, représentées par quelques cas de fistules péri-prothétiques, de claudication du membre supérieur gauche en cas de couverture prothétique de l’ostium de l’artère sous-clavière gauche, ainsi que la survenue d’une hypertension artérielle par rigidification aortique.
Vincent le Pennec (CHU Caen) présente les traumatismes du rein, relativement rares, dans lesquels il recommande une attitude « attentiste » pour les minimes fuites de produit de contraste chez des patients stables. Cependant, dans la situation d’une abstention thérapeutique et de surveillance clinique, il recommande la réalisation d’une imagerie de contrôle afin de dépister des faux-anévrysmes d’apparition tardive, responsables de potentiels accidents hémorragiques à distance du traumatisme. Les traumatismes du bassin représentent la seule situation où un patient hémodynamiquement instable peut relever d’une embolisation radiologique en cas de saignement artériel. Le Dr Le Pennec ne préconise pas une embolisation forcément sélective en urgence, celle-ci peut être proximale, voire de l’artère iliaque interne. Les agents d’embolisation à utiliser sont des gélatines résorbables ou éventuellement de la glu, mais il faut éviter les microparticules qui augmentent le risque de complications ischémiques telles que des paralysies sciatiques, nécroses musculaires ou viscérales.
La session se termine par l’intervention d’Audrey Fohlen (CHU Caen), qui rappelle l’intérêt d’une utilisation rigoureuse des classifications AAST pour structurer l’analyse et les comptes rendus des scanners de polytraumatisme. L’échographie est un mauvais examen dans le traumatisme et peut méconnaître 20-50% des lésions traumatiques spléniques. Enfin, concernant l’embolisation splénique, les résultats intermédiaires de l’étude SPLASH semblent montrer une diminution du taux de rupture secondaire de la rate en cas d’embolisation splénique comparativement au traitement conservateur.
Rémi Agbonon – Paris