Vers une généralisation de l’acquisition tardive pour l’exploration des troubles cochléo-vestibulaires en IRM ?

images_jfr2019

Vers une généralisation de l’acquisition tardive pour l’exploration des troubles cochléo-vestibulaires en IRM ?

Auteur(s) : 
Arnaud ATTYE
Michael ELIEZER

Arnaud ATTYE 1, Michael ELIEZER 2 – 1. Université Grenoble Alpes, Grenoble. 2. Hôpital Lariboisière, Paris

Plus de 12 ans après les premières publications scientifiques chez l’homme, l’exploration des compartiments liquidiens de l’oreille interne en IRM avec acquisition retardée après injection de gadolinium étend ses indications. Initialement réservée aux seuls patients porteurs de la maladie de Ménière, ce protocole d’acquisition consiste à explorer, par une séquence 3D-FLAIR, l’oreille interne 4 heures après injection. Ce protocole permet la visualisation directe de l’endolymphe mais apporte également une sensibilité accrue à la détection d’anomalies de perméabilité de la barrière hémato-labyrinthique. Ces propriétés ont récemment montré dans la littérature un intérêt diagnostique pour des patients porteurs de tableaux cliniques différents de celui de la maladie de Ménière.

Vestibulopathie récurrente

Les patients souffrant de crises de vertiges récurrentes itératives sans troubles cochléaires sont très nombreux, et difficiles à étiqueter par le clinicien. L’intérêt d’acquérir les images remnographiques 4 heures après injection consiste en la visualisation de l’hydrops utriculaire isolé (Figure 1), qui consiste en une protrusion de l’utricule dans la portion non ampullaire du canal semi-circulaire latéral. D’un mécanisme physiopathologique différent de celui de la maladie de Ménière, ce type d’hydrops est probablement constitutionnel et décompensé à l’âge adulte.

images_jfr2019

Figure 1. Guide d’interprétation des variations de volume compartimentale de l’utricule et du saccule. La ligne du haut (A, B, C) est une représentation schématique du labyrinthe en 3D. Les images suivantes représentent des coupes 3D-FLAIR, d’abord extraites de sujets sains (D et G), de patients avec un hydrops endolymphatique (E et H) et de patients présentant respectivement une atélectasie utriculaire (F) et une fistule du saccule (I). L’utricule est représenté par une flèche blanche, en position normale sur l’image D et protrusif dans la portion non-ampullaire du canal semi-circulaire latéral sur l’image E (flèche blanche), réalisant un hydrops canalaire. Sur l’image F il est en limite de visibilité en raison du tableau atélectasique. Le saccule est représenté par une flèche grise pointillée de volume normal (G), avec un hydrops sacculaire (H) et un saccule non visible (I). Pour information les ampoules du canal semi-circulaire postérieur sont représentées par une flèche pointillée blanche.

Vertiges paroxystiques positionnels bénins récurrents

Contrairement à la forme sporadique bénigne décelable avec la classique manœuvre de Dix et Hallpike, la forme récurrente des VPPB est extrêmement handicapante et s’associe sur les IRM avec acquisition retardée avec la présence d’un rehaussement canalaire isolé qui peut être secondaire à un premier épisode de « névrite vestibulaire » clinique (crise de vertige aigu témoignant donc en fait d’une véritable labyrinthite radiologique) ou isolé. Les séquences T2 sont indispensables pour rechercher une fibrose canalaire associée.

Crise de vertiges récurrents secondairement associés à une aréflexie vestibulaire

L’aréflexie vestibulaire est un déficit total de la fonction vestibulaire. Dans sa forme classique et aiguë, elle est la résultante de la « névrite » vestibulaire qui se manifeste par une prise de contraste à 4h des structures labyrinthiques. Dans sa forme chronique et insidieuse, l’IRM réalisée 4 heures après injection de gadolinium permet de mettre en évidence une atélectasie utriculaire dans deux cas sur trois (Figure 1).

Vertiges aux bruits

Le syndrome de Minor qui consiste à des crises vertigineuses déclenchées par le bruit (phénomènes de Tulio) se caractérise en scanner CT ou CBCT par une déhiscence osseuse d’un canal semi-circulaire. L’IRM réalisée 4 heures après injection de gadolinium permet de détecter dans un tiers des cas un hydrops endolymphatique associé et dans 10% des cas un rehaussement isolé du canal déhiscent, non distinguable radiologiquement de celui de la « névrite vestibulaire ».

Surdité brusque

La maladie de Ménière comme la pose d’un piston stapédien trop long en cas d’otospongiose peuvent s’accompagner d’épisodes de surdités brusques parfois non réversibles. L’IRM avec acquisition retardée, particulièrement réalisée à 3 Tesla, permet de mettre en évidence une fistule intra-labyrinthique se manifestant en fait par une absence de saccule visualisable, traduisant la présence de gadolinium dans le compartiment endolymphatique (Figure 1).

Conclusion

L’IRM de l’oreille interne réalisée 4 heures après injection de gadolinium remplace progressivement l’IRM avec acquisition précoce après injection dans l’exploration des troubles cochléo-vestibulaires. Cette transition se fait au bénéfice des patients dont on peut visualiser la lésion causale de troubles longtemps étiquetés comme psychologiques. Les premières études de monitoring thérapeutique montrent que l’IRM permet de mieux sélectionner les patients candidats à la chirurgie et confortent le rôle essentiel du radiologue dans cette révolution diagnostique.

En savoir +

Séance scientifique

Séance de communications orales en imagerie ORL

16:45 - 18:30

Salle 242

Voir programme