En se présentant à cette séance, la coloscopie virtuelle (alias coloscanner) pouvait nous apparaître comme une technique débattue, aux indications floues et à la qualité variable, en somme : un magnifique thème pour une joute oratoire entre deux spécialités médicales. Le style, le contenu de cette séance ainsi que la complémentarité des orateurs tranche d’emblée avec ces préjugés. Loin des guerres de chapelle, les intervenants se sont attachés à nous présenter une technique rodée, aux indications bien codifiées, et qui en France semble tout à fait complémentaire à la coloscopie optique.
C’est donc un gastro-entérologue qui ouvre le bal. Après nous avoir rappelé que le cancer colorectal n’était pas à prendre à la légère et que le volume annuel de coloscopies optiques en France dépassait le million, M. Levy (Créteil) nous a présenté quelques chiffres à connaître. Une sensibilité de détection des polypes avoisinant les 95%, mais surtout autour de 7% de gestes incomplets (difficultés techniques, préparation insuffisante ou sténose infranchissable). Puis se sont succédé vidéos d’endoscopies commentées présentant les différents types de polypes et leur ablation (gare aux polypes plans si bien cachés !) Enfin, l’orateur précise que « polype vu doit être polype pris » : petit ou grand, il doit être enlevé !
Retour à la radiologie avec O. Lucidarme (Paris). Quelle place a donc cette technique minimalement invasive qu’est le coloscanner ? En France : « en secours d’une coloscopie optique impossible dont l’indication est posée. » Comment l’optimiser ? Trois incontournables : 1) La préparation colique, alliant régime sans résidu et préparation sèche du côlon (double laxatif) ; 2) Le marquage des selles ; 3) La répétition de l’acquisition dans deux positions opposées. Enfin, l’orateur nous a fait voyager dans l’histoire des performances de coloscanner, la variabilité des résultats des grandes séries reposant essentiellement sur le non-respect des protocoles de préparation. À bon entendeur !
Après l’optimisation, voici les trucs et astuces de l’imagerie. M. Djabarri (Créteil) a commencé par présenter la réalisation du scanner. Insufflation colique automatisée de CO2 via une canule basse, qui se doit d’être continue tout au long de l’examen, avec un monitorage pression-volume. Deux hélices basse dose sans injection pour une durée totale d’examen de 10 minutes. S’ensuit la lecture avec une complémentarité entre le mode 2D (référence pour la caractérisation) et 3D (visualisation aller-retour caecum-rectum impérative) (Fig. 1), sans pour autant se priver du détecteur automatique proposé par les constructeurs. Enfin, quelques pièges : les résidus (démasqués par le marquage des selles et la double acquisition), les spasmes coliques, les veines hémorroïdaires se moulant sur la paroi rectale. Mise en garde : ne pas se contenter d’un succès facile ! Une image pouvant en cacher une autre (cancer synchrone) …
Pour conclure cette séance, P. Lefere (Roeselare, Belgique) a dressé un état de l’art version 2017. Chiffres clés et recommandations : une sensibilité et spécificité du coloscanner égale à l’endoscopie pour les polypes >10 mm. De 6 à 9 mm, sensibilité et spécificité varient entre les études tout en restant inférieures à celles de l’endoscopie. En cas de symptomatologie aiguë, pas de coloscanner : danger ! Enfin, un conseil avant de se lancer : avoir interprété au moins 175 examens !
Jules GREGORY
Paris