La naissance de la radiologie n’aurait pu être possible sans la découverte en science physique des rayons X par Wilhelm Röntgen en novembre 1895. En effet, le physicien Röntgen a radiographié la main de son épouse, Anna Bertha Röntgen, en l’interposant entre un tube à rayons X et une plaque photographique (fig. 1). Cette première technique d’imagerie a eu un succès quasi immédiat avec l’ouverture de services de radiologie dès le début de l’année 1896. L’ingénierie est-elle toujours le précurseur des techniques de la radiologie ?
L’utilisation des sciences fondamentales comme outil de conception de technologies médicales est dès lors apparue comme un enjeu majeur au développement de l’imagerie et de la radiologie. L’ingénierie biomédicale est la naissance d’une discipline qui se distingue de l’ingénierie classique en raison de sa capacité à répondre à cet enjeu. L’ingénieur biomédical est effectivement habilité à appliquer la technologie à la conception, la fabrication, la maintenance (corrective et préventive) et la gestion d’appareils de diagnostic, de thérapie tout en s’adaptant aux contraintes liées au monde médical. Celles-ci sont nombreuses au vu des exigences réglementaires, de la radioprotection et de la nécessité de répondre aux besoins croissants de l’imagerie. En effet, en France, une augmentation de la population de 31 % pour les plus de 60 ans et de 14 % pour les plus de 75 ans est à prévoir d’ici l’année 2035 d’après une étude menée par l’INSEE. De plus, le vieillissement de la population engendre un nombre de personnes de plus en plus dépendantes et un nombre accru d’individus atteint de maladies neurodégénératives. L’environnement (allergies), sa dégradation (pollution) et les mauvaises habitudes de vie concourent à exposer davantage la population aux maladies.
La radiologie, étroitement combinée à l’optimisation et à l’innovation des technologies, apparaît comme une solution de prévention et de détections précoces des pathologies. Les techniques d’imagerie ont certes considérablement évolué depuis la première image radiologique mais les évolutions n’en restent pas moins importantes pour répondre à ces nouveaux enjeux et développer une médecine plus prédictive et bien plus personnalisée. L’ingénierie biomédicale permettra ainsi aux dispositifs de radiologie d’être minimalement invasifs, moins délétères et aussi plus spécifiques, plus performants et plus sensibles. L’ingénierie joue également un rôle important dans l’organisation des soins, en modernisant les systèmes d’information hospitaliers, en développant l’accessibilité de l’imagerie aux patients et en gérant le stockage des images et des données patients. La dimension de l’ingénierie prend donc tout son sens dans l’amélioration de la prise en charge et du suivi des patients en répondant également aux enjeux sociétaux : déplacements des pratiques hospitalières vers l’ambulatoire et la téléradiologie.
Par ailleurs, le mot interface décrit d’une certaine manière parfaitement le métier d’ingénieur biomédical et ces avancées technologiques ne peuvent se faire sans l’échange et la collaboration avec des équipes médicales pluridisciplinaires, notamment avec les médecins, premiers utilisateurs des dispositifs, qui expriment des perspectives et suggestions d’amélioration fondamentales aux progrès des techniques de la radiologie. L’appareil médical se doit d’être intuitif, automatisé, ergonomique, précis et rapide. Le « workflow » du radiologue doit être optimal afin qu’il puisse passer le plus de temps possible auprès du patient. L’ingénierie sera d’autant plus au service de la radiologie, avec le développement de l’intelligence artificielle comme le « machine learning » qui fournira au radiologue une aide précieuse dans sa pratique médicale.
Estelle JELLAD
Responsable des Ateliers Biomédicaux 2018, Ecole Polytech Lyon