Aurélie Jalaguier-Coudray, Gilles Houvenaeghel, Rim Villard-Mahjoub, Monique Cohen, Eric Lambaudie – Institut Paoli-Calmettes, Marseille
La technique du ganglion sentinelle a été développée à partir des années 2000 et vise à ne prélever que le premier relais ganglionnaire du sein. En cas de ganglion envahi, un curage axillaire était systématiquement réalisé. En 2011, l’essai ACOSOG-Z0011 bouleverse les pratiques. Cet essai multicentrique compare le taux de survie globale et le taux de survie sans récidive des patientes avec traitement conservateur pour des tumeurs T1 ou T2, avec 1 ou 2 ganglion sentinelle positifs sans rupture capsulaire traitées par chimiothérapie adjuvante et/ou hormonothérapie avec ou sans curage axillaire complémentaire. Aucune différence significative n’a été démontrée en termes de survie globale et de survie sans récidive. Le suivi médian à 9 ans confirme ces résultats. D’autres auteurs ont confirmé ces données. Si la mise en évidence d’un envahissement ganglionnaire axillaire n’est plus synonyme de curage ganglionnaire, quel est le rôle du radiologue ?
Le radiologue doit-il continuer à explorer le creux axillaire ? La réponse est « Oui », le radiologue doit continuer à explorer les ganglions lors du bilan initial. En effet, la mise en évidence d’un envahissement ganglionnaire va aider à la décision thérapeutique. La mise en évidence d’un ganglion positif peut contre-indiquer la réalisation d’une reconstruction mammaire immédiate, la réalisation d’une radiothérapie peropératoire, ou peut indiquer une chimiothérapie néo-adjuvante si le phénotype tumoral est triple négatif ou HER2 positif ou Luminal B Her2 négatif.
L’exploration des aires ganglionnaires (axillaires, sous-claviculaires et mammaires internes si facteur de risque) doit être systématique en cas de cancer mammaire avéré ou de lésion hautement suspecte ACR4c/ACR5. L’échographie est la technique de choix pour l’exploration ganglionnaire; sa sensibilité et sa spécificité sont élevées (jusqu’à 94% et 98%, respectivement). Elle se fait à l’aide d’une sonde linéaire haute fréquence (12-18MHz), chez une patiente en décubitus dorsal discrètement oblique, bras au-dessus de la tête pour le creux axillaire et bras le long du corps pour l’exploration sous-claviculaire et mammaire interne. L’envahissement ganglionnaire se fait progressivement de l’étage de Berg I à l’étage Berg III puis en sus-claviculaire. Il conviendra donc de toujours commencer par l’exploration de l’étage I de Berg qui est l’étage envahi en premier, et le plus fréquemment (58.2%). L’échographie part des vaisseaux axillaires et descend le long de la veine mammaire externe assez bas, jusqu’à l’union des quadrants externes du sein car, comme l’a démontré Klough et al., les ganglions les plus fréquemment envahis sont localisés à la partie basse de l’aisselle (espace A: 86.8%). En cas de ganglion suspect de l’étage I de Berg, il est nécessaire d’étendre l’exploration aux étages II puis III de Berg. Les signes échographiques faisant suspecter une atteinte ganglionnaire sont : 1°) un épaississement cortical > 3 mm, focal ou global; il s’agit du premier signe. En effet, les cellules tumorales arrivent en sous-capsulaire par des sinusoïdes et se développent en premier dans le cortex, 2°) une disparition du hile partielle ou totale avec un ganglion de forme arrondie (fig. 1) puis 3°) l’infiltration du tissu graisseux adjacent par rupture capsulaire avec un ganglion qui apparaît aux contours irréguliers. La mise en évidence de ganglions suspects doit être prouvée histologiquement avant chirurgie. La sensibilité de la microbiopsie est plus élevée (83.3 % versus 72.2% pour la cytoponction), sans différence significative (p=0.13). L’INCa recommande les deux techniques dans l’exploration des aires ganglionnaires, sans préférence pour l’une ou l’autre technique. Il est également important de préciser le nombre de ganglions axillaires suspects : en effet, si sur le bilan d’extension, moins de deux ganglions sont positifs en histologie, sans rupture capsulaire, la patiente reste éligible à la réalisation d’un ganglion sentinelle, selon les critères ACOSOG.
En conclusion, en 2019, le radiologue conserve un rôle majeur dans l’exploration ganglionnaire.
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